« Nous en avons assez d’attendre! »

DISRAELI – Des riverains du lac Aylmer en ont plus qu’assez de la lenteur avec laquelle le dossier du pont de la voie ferrée est mené. Depuis plus de 20 ans, cette infime partie du chemin de fer Quebec Central Railway, qui ne sert même plus à ce jour, coupe la circulation sur le lac en deux et nuit au développement sur les berges.

« Le  lac Aylmer est amputé d’une portion de trois kilomètres de longueur, soit la baie de Disraeli. De plus, cette portion du lac a le plus fort potentiel de développement commercial, touristique et résidentiel. C’est aussi dans la baie de Disraeli qu’est débutée la construction du parc plage et où est prévue la construction de condos », a déclaré l’organisateur de la manifestation tenue le 14 juin, Éric Labonté.

« Je pense qu’à part Postes Canada, personne n’a avancé dans ce dossier, a-t-il renchéri, en faisant référence aux nombreuses lettres qui ont été envoyées au ministère des Transports à ce sujet par le passé. Il est grand temps qu’il se passe quelque chose. Nous n’en sommes plus à l’étape d’échanger des timbres et des paroles en l’air! »

« L’exaspération est au maximum présentement. Plusieurs laissent de l’argent sur la table avec leurs immeubles. Certains ont des maisons à vendre et savent qu’ils n’auront pas un juste prix parce qu’il y a 20 pieds de fer qui traînent depuis 20 ans », peste M. Labonté.

Cette prétention est d’ailleurs confirmée par un courtier immobilier ayant des résidences à vendre sur les rives du lac Aylmer. « Je perds deux clients sur trois du côté de la baie de Disraeli à cause de ce pont. Je n’ai pas le choix de les informer à ce sujet et dès qu’ils apprennent que la baie est coupée du reste du lac, la plupart décident de regarder ailleurs », soutient Vincent Morin. Selon lui, une résidence qui va se vendre à 300 000 $ du côté de la plus grande partie du lac, se vendra 250 000 $ dans la baie de Disraeli.

Par ailleurs, ce qui choque encore plus les riverains, c’est que depuis maintenant quelques années, plus un seul train passe par là. « Je pense qu’auparavant, on pouvait demander seulement le relèvement du pont, on comprenait la situation. Aujourd’hui, on sait que le train ne repassera plus jamais. Le rail est descendu de 2 000 pieds à Black Lake alors s’ils ont besoin de le rebâtir, il va falloir qu’ils contournent le trou et ça va coûter des millions. Je ne peux pas croire que seulement 20 pieds peuvent changer quelque chose dans ce dossier », a dénoncé M. Labonté. 

Tentative échouée 

En 2009, une tentative sérieuse de faire bouger le dossier avait été tentée par l’Association des riverains du lac Aylmer (ARLA). Elle avait créé un comité de travail dont les objectifs étaient de hausser la navigabilité sous le pont de la voie ferrée de manière à égaler celle du pont de la route 112, libérant ainsi une hauteur de 60 cm.

En février 2009, l’ARLA rencontrait Laurent Lessard, alors député de la circonscription de Frontenac dont Disraeli faisait partie. Le mois suivant, avec l’appui des maires la Ville de Disraeli et de la Paroisse, le ministre Lessard annonçait des investissements afin de réaménager, entre autres, le pont de la voie ferrée. Par la suite, les mois s’écoulent et le dossier stagne.

En juillet 2010, à la suite de plusieurs pourparlers avec M. Lessard, la Ville de Disraeli annonce que le pont de la voie ferrée serait démantelé et que les pièces de celui-ci seraient remisées afin de prévoir un remontage éventuel advenant que l’activité ferroviaire reprenne. Les travaux d’environ 15 000 $ se feraient sous la supervision du ministère des Transports. Les mois continuent de s’écouler et rien ne se passe. En date du mois de juin 2014, le dossier n’a toujours pas bougé et le pont continue d’obstruer le passage entre la baie de Disraeli et le reste du lac.

Un peu d’histoire…

Dans les années 1860, seul le Grand Tronc dessert Sherbrooke. L’absence de compétition tend à limiter le développement de la ville et de la région. Non seulement le Grand Tronc est libre d’imposer ses tarifs, mais la configuration technique de son réseau rend coûteux le transbordement des marchandises à l’extérieur de celui-ci. Enfin, le tracé du Grand Tronc évite certaines régions riches en ressources forestières et agricoles des Cantons de l’Est dont Sherbrooke pourrait tirer profit.

C’est avec cette dernière idée en tête que des hommes d’affaires de Sherbrooke, dont le député conservateur de l’endroit, Joseph Gibb Robertson, fondent la Sherbrooke, Eastern Townships & Kennebec Railway en 1869. Président de l’entreprise qui sera renommée Quebec Central en 1875, Robertson s’emploie à gagner des appuis, tant financiers que moraux, pour le projet.

Amorcés en 1870, les travaux se terminent en 1880 alors que les convois atteignent Lévis en utilisant la voie de la Lévis & Kennebec depuis Vallée-Jonction. Par ce chemin de fer, les commerces et industries de Sherbrooke ont accès à un plus grand bassin de consommateurs.

Source: Bibliothèque et Archives nationales du Québec