Le huard complique le retour des Nordiques

Québecor et la Ville de Québec ont accompli des pas de géants en 2015 afin de ramener une formation de la Ligue nationale de hockey (LNH) dans la Capitale-Nationale, mais des nuages viennent assombrir les chances de réussites estiment deux experts interrogés par Les Affaires.

L’économiste en chef du Conference Board du Canada et vice-président principal, Glen Hodgson est passionné de sport professionnel et de hockey. En compagnie de son ex-collègue Mario Lefebvre, il avait publié en 2014 Power Play : The Business Economics of Pro Sport@$p>. Selon l’auteur, quatre conditions sont essentielles à la réussite d’une franchise professionnelle dans une ville canadienne ou américaine :

1-La taille du marché;

2-Le niveau de revenu par habitant;

3-La présence suffisante de grandes entreprises et de sièges sociaux;

4-L’égalité des conditions d’une franchise à l’autre au sein d’une même ligue (taux de change, présence ou non d’un plafond salarial).

Selon M. Hodgson, les conditions à Québec sont les mêmes qu’en 2014 à une exception : le taux de change du dollar canadien par rapport à la devise américaine. «C’est devenu le facteur le plus complexe. Par exemple, les 500 M $ américains exigés par la LNH dans le processus actuel d’expansion équivalent maintenant à près de 700 M $ canadiens», dit M. Hodgson.

D’ailleurs, l’économiste est loin d’être convaincu que l’expansion est la meilleure solution pour Québec. Pour 500 M $ US, Québec obtient l’équivalent de la huitième équipe la plus valorisée au classement du magazine Forbes, dit-il. «À côté de cela, les Coyotes de Phoenix valent seulement 200 M $ US. Autrement dit, la LNH veut 2,5 fois la valeur d’une franchise comme celle de Phoenix.»

Même si le dollar canadien a reculé de plus de 15% depuis le début de 2015 par rapport au billet vert et que le prix du pétrole a chuté de 66% en 15 mois, Glen Hodgson estime qu’il est encore possible de ramener avec succès une équipe de la LNH à Québec. Cependant, elle devra compter sur un propriétaire qui aura de bons moyens et sur une équipe de direction qui gérera de manière prudente le plafond salarial.

Un cadeau empoisonné

Le professeur titulaire et expert en marketing du sport à l’UQAM, André Richelieu, est très sceptique sur les probabilités de réussite d’une franchise de la LNH à Québec.

«D’un point de vue économique, une expansion n’aurait pas de sens à Québec, ce serait un cadeau empoisonné. Avec un tel investissement, il est impensable d’envisager d’avoir une équipe compétitive avant plusieurs années.»

La voie la plus logique serait l’achat et le transfert d’une franchise, indique l’expert. «Il y a un monde de différence entre l’acquisition des Jets de Winnipeg et leur transfert, en 2011, et l’expansion à laquelle la LNH veut procéder en 2017 ou 2018. Avec la somme de 190 M $ US, les Jets ont eu une équipe, tandis qu’avec 500 M $ US, Québec n’a rien, elle a seulement le droit de joindre le circuit Bettman. Québecor devra débourser de 100 à 150 M $ US supplémentaires pour mettre son équipe sur pied et lancer les activités de la franchise des Nordiques.»

Cependant, M. Richelieu estime que de tels déménagements d’équipes donneraient l’image d’un circuit professionnel en difficultés. Un tel scénario est très mauvais pour l’image de la LNH qui représenterait un aveu d’échec pour Gary Bettman, notamment en ce qui concerne l’expansion dans le sud des États-Unis, explique-t-il.