«Vaillancourt : regarde si c’est beau», un documentaire de John Blouin

Le cinéaste et projectionniste John Blouin présentera en avant-première son long-métrage au sujet de l’artiste Armand Vaillancourt, le dimanche 5 mai, au Musée national des beaux-arts du Québec.

Ce dernier est connu pour tout ce qu’il a sculpté, tant artistiquement que socialement, ici comme ailleurs. «C’est un géant comme on en croise rarement. Mais qu’est-ce qui a sculpté ce monument, cet homme? Qu’est-ce qui lui donne cette force créatrice? Ce documentaire intimiste s’approche comme jamais de Vaillancourt, se racontant, pensant à son présent, performant sa vie avec une authenticité désarmante», indique le résumé du documentaire, «Vaillancourt : regarde si c’est beau», au sujet de celui qui est né à Black Lake et qui vit encore dans la région.

Armand Vaillancourt (Photo gracieuseté – Nicolas Bilodeau)

Ce long-métrage de 80 minutes représente le fruit de plus d’une décennie de travail pour John Blouin. «Ça n’a pas été à temps plein, mais ça m’a pris beaucoup d’efforts, je me suis battu, je suis tombé et je me suis relevé. Il y a un auteur que j’aime beaucoup, Samuel Beckett, il disait : ‘’Déjà essayé. Déjà échoué. Peu importe. Essaie encore. Échoue encore. Échoue mieux’’. C’est un beau message qui démontre qu’il ne faut pas avoir peur des embûches parce que cela fait partie du processus», raconte le cinéaste originaire de Thetford Mines.

Le tournage s’est amorcé sans moyens financiers, mais John Blouin n’a jamais abandonné. «Finalement, on a eu un montant de la part de la Ville de Thetford Mines, ce qui m’a permis de tourner ce qui est devenu le film complet. Ce fut donc 12 années de travail pour ne conserver que quatre jours de tournage! Ça m’a pris du temps avant d’arriver au cœur, puis j’avais assez de connaissances et d’expérience avec Armand pour saisir ce que je voulais faire. Tout était là pendant ces quatre jours.»

Une histoire que lui a raconté l’artiste décrit bien, selon lui, le processus de création de son documentaire. «Un jour, une personne s’est mise à le critiquer puisqu’il terminait ses peintures très rapidement. Elle lui disait que ça n’avait pas de bons sens qu’elles coûtent de 1000 $ à 2000 $ alors que ça ne lui prenait que deux secondes les terminer. Armand lui a répondu que ça ne lui avait pas pris deux secondes, mais bien 70 ans. Pour ce film, ça m’a pris 12 ans pour saisir ce court moment de grâce.»

«C’est un gros projet parce qu’Armand Vaillancourt est un monument. Je crois que les gens vont découvrir l’essence d’un homme plus grand que nature.» – John Blouin

John Blouin souhaite que ceux qui verront le documentaire découvrent l’homme que lui a connu. «Ce n’est pas un film qui dit en telle année il a fait telle affaire. C’est vraiment une rencontre intimiste avec un homme qui a un regard sur le présent, mais ayant une expérience de vie incroyable. On n’a pas idée de ce qu’il a fait et de ce qu’il représente, tant socialement qu’au point de vue de l’art. On a tourné chez lui, dans sa fermette, et c’est un endroit où peu de gens ont accès.»

Ce projet, qui au départ était censé être un long-métrage sur la région de Thetford et dont Armand Vaillancourt était l’un des personnages, est devenu une création axée sur l’artiste. Bien que le documentaire soit présenté en avant-première cette fin de semaine, la sortie officielle est prévue à l’automne prochain. La distribution est assurée par les Films du 3 mars.

Un parcours différent

John Blouin définit sa formation de quelque peu atypique. Après avoir étudié en arts et lettres au Cégep de Thetford, il a obtenu un baccalauréat et amorcé une maîtrise à l’UQAM en études littéraires et sémiologie/cinéma. Pendant cette période, il est devenu projectionniste à l’Office national du film du Canada (ONF).

«C’était l’un des meilleurs emplois du monde! J’ai commencé à faire des performances cinématographiques alliant projecteurs 35-16 mm et numériques, ombres et trame sonore en direct. J’ai alors fondé Cabina Obscura et j’ai eu la chance de me promener dans quelques villes et festivals, comme à Montréal et Pékin. Je suis aussi allé en Louisiane. J’en fais moins aujourd’hui puisque je me suis un peu tourné vers le film plus traditionnel», explique l’artiste.

Parmi ses autres projets, John Blouin a également réalisé une trilogie de courts-métrages sur la mort du cinéma de l’ONF. L’un d’eux, «Filmstripe», a d’ailleurs remporté un bon succès et a été présenté dans plusieurs événements dans le monde. Il a aussi réalisé un essai-documentaire intitulé «Lou, La vie!» et destiné à sa fille.

«LUX», une installation cinématographique, et «Cap au Pire», un nouveau cycle de performance, sont ses toutes dernières œuvres en circulation. Depuis peu, John Blouin est le nouveau commissaire de PHOS, un festival à Matane consacré aux divers usages de l’image photographique et numérique d’aujourd’hui.

Prochainement, il souhaite tourner un moyen-métrage au Grand lac Saint-François s’intitulant «Rivière noire». De plus, il rentre bientôt en production d’une nouvelle installation autour de la rage.

Un autre projet qui lui tient à cœur est de pouvoir présenter, d’ici quelques années à Thetford Mines, un événement autour des arts numériques et médiatiques. L’idée a germé après avoir présenté l’une de ses performances au Musée minéralogique et minier. Les trois séances avaient en effet été fort courues.

«Je crois que dans la région, il y a vraiment une soif d’art contemporain. C’est l’une des raisons pour laquelle je suis revenu et aussi pour partager ce que j’ai acquis avec le temps. On le voit avec l’arrivée d’un nouveau festival de musique émergente qu’il y a de la place pour ce type d’activité. J’ai déjà rencontré plusieurs intervenants locaux à ce sujet et la réponse est bonne.»

Par son parcours et son expérience, il souhaite démontrer qu’il existe plusieurs possibilités. «Je ne veux pas me présenter en modèle, loin de là! Toutefois, ce que je veux montrer aux jeunes, c’est qu’il existe plusieurs parcours différents. Le mien est peu orthodoxe, c’est une ligne brisée et non droite. Je veux simplement qu’ils sachent qu’il y a différentes voies même si sur le moment on ne le sait pas», conclut John Blouin.