Lac Aylmer : la qualité de l’eau se serait dégradée rapidement

DISRAELI. Selon une étude commandée par l’Association des riverains du lac Aylmer (ARLA), la qualité de l’eau de ce bijou régional se serait grandement détériorée lors des dix dernières années au point tel qu’elle serait rendue au stade de vieillissement prématuré, aussi appelé eutrophe.

Cette étude, réalisée en 2014 par l’entreprise Naturive de Thetford Mines, en vient à la conclusion qu’il serait important pour les municipalités riveraines d’agir rapidement afin de corriger la situation, notamment en améliorant la performance de leurs équipements d’épuration des eaux usées qui sont déversées dans le lac et ses tributaires.

En effet, les problèmes de contamination au phosphore et le nombre trop élevé de surverses seraient à l’origine de la contamination de l’eau. «Les usines d’épuration des eaux situées autour du lac et de ses affluents n’enlèvent seulement qu’une partie du phosphore. Elles ont été conçues dans les années 1980 avec les spécifications et en considérant la population de cette époque. Les équipements n’ont pas été améliorés depuis ce temps. Il y a aussi de nombreuses surverses. Quand les usines ne sont pas capables de tout traiter, une valve ouvre et le tout s’en va directement dans l’eau du lac ou de ses tributaires», mentionne Richard Châtelain de l’ARLA.

Seulement en 2013, près de 250 surverses ont été répertoriées dans les usines d’épuration des eaux reliées au lac Aylmer et à ses tributaires, soient celles de la Ville de Disraeli, Saint-Joseph-de-Coleraine et Beaulac-Garthby. L’usine de Stratford n’a quant à elle connu aucun épisode de surverse.

«Il s’agit d’une partie du problème que nous avons pu identifier parce qu’il y a assurément d’autres causes. Nous n’avons qu’à penser à toutes les installations individuelles de fosses septiques, les engrais, les savons. Il y a aussi les épandages sur les terres agricoles. Ce sont des aspects qui ne sont pas documentés. Nous semblons cibler seulement les municipalités, mais ce n’est pas le cas, ce sont les seules données étant disponibles», précise M. Châtelain.

Selon lui, il faudrait avoir une étude sur l’ensemble de l’apport en phosphore du bassin versant, mais l’ARLA n’a ni les moyens monétaires, ni les compétences pour effectuer une telle tâche.

Les municipalités concernées

Les recommandations que l’on retrouve à la fin du rapport de Naturive envoient beaucoup la balle aux villages riverains. «Nous avons rencontré les municipalités trois fois dans les six derniers mois et nous avons bien l’intention de poursuivre les rencontres sur des objectifs ciblés. Dans ce rapport, il y a beaucoup de recommandations, mais il faudra choisir où on mettra l’emphase et comment on donnera suite avec ceux prenant les décisions. Nous ne voulons pas que ce rapport soit oublié», affirme Daniel Poirier, président de l’ARLA.

Selon les deux membres de l’association, le plus compliqué est de faire passer leur message en raison de la répartition régionale du lac Aylmer. «Le lac regroupe cinq municipalités, trois MRC et deux régions administratives. Il faut asseoir beaucoup de monde autour de la même table. Ce n’est pas tout le monde qui en est rendu au même point. Par exemple, la MRC du Granit est déjà plus avancée que tout le monde, elle a déjà fait des pas de plus dans ce dossier. Tous sont quand même concernés par la question», soutient M. Châtelain.

L’objectif de l’ARLA est de concerter toutes les parties en même temps afin de faire avancer les choses. Selon eux, il est important que les règlements soient harmonisés à travers toutes les municipalités et que ces règles soient appliquées.

Un plan à l’abandon

Le projet de plan d’échantillonnage quinquennal effectué par l’ARLA était auparavant effectué par le gouvernement, plus particulièrement le ministère de l’Environnement. Ce dernier l’a toutefois laissé tomber et depuis 2008, rien n’avait été fait en ce sens. C’est pourquoi l’association à but non lucratif a décidé de vider sa bourse afin de sortir cette étude.

Questionné à savoir s’il allait prendre en compte les résultats de cette étude, le ministère a répondu par l’affirmative. «Le ministère prend en compte toutes les données et informations qui peuvent aider à comprendre l’état du lac. Cependant, il n’a pas été impliqué dans cette étude. Il n’est donc pas en mesure de commenter le diagnostic ni de corroborer les conclusions de cette étude puisque celle-ci ne nous a pas été transmise», a-t-il répondu à la suite de la demande du COURRIER FRONTENAC.

Recommandations

Voici quelques-unes des recommandations faites par Naturive à la suite de l’analyse des résultats de l’échantillonnage du lac Aylmer et de ses tributaires :

–          Conserver ou recréer une zone de végétation autour du lac afin de diminuer l’érosion des rives.

–          S’assurer de la conformité des installations septiques à proximité des lacs.

–          Sensibiliser les riverains à cesser l’usage de produits domestiques contenant des phosphates.

–          Uniformiser la réglementation environnementale des municipalités autour du lac.

–          Compte tenu de la concentration élevée de phosphore dans le lac et dans certains tributaires, une étude plus détaillée des apports de phosphore dans l’ensemble du bassin versant du lac Aylmer permettrait de mieux identifier les sources et de mieux cibler les interventions pour les corriger.

–          Encourager les municipalités riveraines à améliorer la performance de leurs équipements d’épuration des eaux usées qui sont déversées dans le lac et ses tributaires. Cette amélioration devrait avoir un double objectif mesurable et clairement exprimé soit celui de diminuer les rejets de phosphore et celui de réduire au minimum le nombre de surverses.

(Source : Naturive, Association des riverains du lac Aylmer)

Eutrophisation

Ce phénomène, que l’on nomme eutrophisation, est le processus d’enrichissement graduel d’un lac en matières nutritives. Cet enrichissement provoque une augmentation de la production biologique, notamment une plus grande abondance des algues microscopiques et des plantes aquatiques. Le vieillissement prématuré est un des principaux problèmes qui affectent les lacs de villégiature et les lacs situés en milieu agricole et urbanisé.

(Source : www.mddelcc.gouv.qc.ca)