Cancer : «Pis toi à travers tout ça? Comment ça va?»
Après un premier relais jeunesse tenu au Centre de formation professionnelle Le Tremplin en juin 2016, un premier relais pour la vie communautaire aura lieu le 10 juin prochain à Thetford Mines. Le comité organisateur compte bien dépasser son objectif initial de 60 000$ … l’objectif de 16 équipes a d’ailleurs déjà été dépassé avec désormais 21 équipes inscrites.
Yves Kirouac, président d’héritage Centre-ville et très impliqué dans la vie socioculturelle de Thetford Mines, a accepté la présidence d’honneur de l’événement. M. Kirouac connaît bien ce qu’est que de faire face au cancer, puisqu’il y a été confronté alors qu’il a accompagné sa conjointe, Thérèse Sheffield, à travers cette dure épreuve. On ne parle pas tellement souvent des moments difficiles auxquels font face les proches aidants. Partagés entre leur douleur, leur peur et la volonté de rassurer la personne qu’ils accompagnent, les aidants passent par toute une gamme d’émotions, souvent en silence.
Cancer : «Pis toi à travers tout ça? Comment ça va?»
Texte d’Yves Kirouac, président d’honneur du Relais pour la vie de Thetford Mines
De rares mots que l’on adresse trop peu à celle ou celui qui accompagne une personne atteinte par un cancer. On pourrait croire a priori que l’aidant, parce qu’il n’est pas affecté du mal, se trouve d’une certaine façon «économisé».
Pourtant.
La réalité est autre. Lors de l’annonce du diagnostic, la brutalité de celui-ci assène un KO singulier : On vient de perdre le contrôle de nos vies. Après avoir été renversé par la nouvelle, le réflex immédiat est : «Je dois… » S’attribuant ainsi une responsabilité inconnue et disproportionnée, l’aidant se retrouve en position de partenaire d’un combat inégal.
La valse des mots techniques, scientifiques, voire utopiques, se multiplient au fil des rencontres. Bien que l’on ait jamais eu d’intérêt professionnel dans le domaine de la santé, c’est un véritable «crash cours édulcoré» du tome «Le cancer pour les nuls» dont on nous gave. Et, toujours dans la tête résonne ce « Je dois… »
Affublés de nos nouvelles connaissances, nous avançons d’un pied incertain et, oh combien émotif, allant stupéfier nos familles et amis avec LA nouvelle. «Que vais-je faire si tout le monde pleure?»
Je dois…
Presque pas de réaction? Ont-ils compris? Ils sont sous le choc!
Je dois…
Mais souviens-toi, que toi aussi avant, tu croyais qu’un cancer ce n’était pas si pire aujourd’hui… jusqu’à ce qu’on en soit foudroyés. Alors…
Je dois…
Les minutes interminables avant que l’être aimé n’entre en salle d’opération.
Je dois…
La civière qui traverse les portes…
Je dois…
L’attente, interminable, injustifiable, incompréhensible. Pourquoi ça me paraît aussi long? Et s’il y avait des complications?
Je dois…
Puis vient après l’opération. Vous devez faire les injections de cette façon. Vous devez vider les drains de cette façon. Quand est-ce le prochain rendez-vous? Et tout ceci et tout cela …
Je dois…
Il y a aussi les pseudos experts : Tu sais qu’untel a eu le même cancer et lui c’était tel traitement et tel protocole? Mais la chimio et la radio, c’est ça qui tue le patient, je l’ai lu, va voir sur internet! Mais il y a un traitement naturel qui combine les aliments sains sans engrais chimique avec une recette de jus vert…
Je dois…
On voit l’autre souffrir … Les traitements de chimiothérapie sont plus durs que l’on pensait. Deux jours au lit, sans forces. Prochain traitement, dans trois semaines. Ça n’a pas de bon sens. Puis, vient la radiothérapie. C’est à l’extérieur de la ville, il n’y a pas de ressources proches.
Je dois…
Et puis tout à coup, cet ami âgé surgit de nulle part et te dit : «Pis toi à travers tout ça? Comment ça va?»
« Ben je d… Pour être honnête, je ne sais pas trop trop… »
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