Droit de parole aux personnes vivant avec un handicap

Récemment, un chef de parti et député, minoritaire, par ses convictions et sa ténacité, a réussi à faire modifier une loi archaïque qui imposait le serment au roi d’Angleterre. En exprimant une position différente de celle tenue par la majorité, cette minorité a montré qu’une autre voie est possible. Elle nous incite à questionner ce que nous tenons pour acquis et à trouver de nouvelles réponses aux questions de société.

Je suis né avec un handicap intellectuel ou physique ou je le suis devenu à la suite d’un accident ou un problème de santé, mais les impacts sur ma vie sont les mêmes. L’accès à tout dans ma vie est chamboulé, limité et réduit au minimum.

Petit, mon quotidien n’est pas d’aller jouer avec des amis ou de participer à un sport quelconque, non, mon quotidien ce sont les rendez-vous à l’hôpital pour y voir médecins, spécialistes de tous genres et passer examen par-dessus examen. Mon quotidien c’est de voir mes parents, ma famille se débattre pour tenter de m’offrir un semblant de vie malgré mon handicap. De les voir épuisés parce que mon état demande énormément et qu’il y a peu de services pour les aider.

Est-ce que j’ai le droit à un programme scolaire normal? Non.  De choisir mon école ? Non. De participer aux activités scolaires, aux sports? Non. Moi, je dois faire un programme spécial qui n’est offert que dans une autre ville, un autre quartier. Un  programme adapté, mais limité, qui pourra ou pas me permettre une meilleure autonomie en fonction de l’implication de  l’enseignant, de l’école, de mes parents. Un programme pensé pour les personnes vivant avec un handicap, mais qui n’offre qu’une infime participation à une vie normale.

Est-ce que je peux avoir un véhicule à moi? Rarement, car mes limitations me privent de ce privilège et m’obligent à dépendre des autres pour me déplacer : d’un parent, d’un ami, d’un taxi ou du transport adapté et à limiter mes sorties.

Est-ce que j’ai même ce droit de me faire entendre? De revendiquer mes besoins? De dire ce qui me convient ou pas? De dire que la société peut et doit améliorer les programmes qui me sont offerts? Qu’il n’y ait pas toujours de frein à ma participation à une vie active.

Au Québec où la démocratie est censée être un droit pour tous, puis-je me permettre de contredire l’état d’un service qui me concerne? De demander révision ou amélioration dudit service? Oui, c’est mon droit!  Le but n’étant pas de faire admettre à ceux qui  sont responsables de sa gestion qu’ils font erreur, mais d’en faire une force, un levier pour  l’évolution, pour l’innovation sociale et l’amélioration du service dans l’intérêt de tous. Vous comprenez que je parle ici du service du Transport adapté de la région de Thetford.

Alors, quels sont mes droits? Si je n’ai pas le droit de contester, de faire connaitre mes besoins, de suggérer des solutions pour les services qui me concernent, comment cette société pourra-t-elle évoluer?  

Ce sont les conflits sociétaux qui contribuent à redéfinir les normes et à peindre un nouveau vivre-ensemble, à remettre en question ces normes établies et nous incitent à les repenser dans l’intérêt de tous.

Pour qu’une société évolue, il faut l’implication de tous, et ce à tous les niveaux, une participation active des gouvernements pour rendre les programmes de subventions plus accessibles, qui tiennent compte de la réalité de chaque région et de leurs besoins, ainsi qu’une volonté régionale de travailler pour l’ensemble. 

Oui, je suis handicapé, mais suis bien plus limité par votre volonté d’améliorer les programmes qui me permettraient de m’intégrer, d’avoir une vie meilleure, que par mon état intellectuel ou physique.

En cette période où la guerre en Ukraine devrait nous faire repenser nos actions sociétales et nos obligations les uns envers les autres, je sais que la seule solution possible au bénéfice des usagers est et a toujours été l’union des 19 municipalités de la MRC des Appalaches pour le service du transport adapté. Je fais donc le vœu pour la nouvelle année qui commence d’une réconciliation des partenaires municipaux et d’une réforme du service.

Bonne année 2023 à vous tous maires et conseillers qui avez ce pouvoir de faire une société meilleure.

Jordan Jolicoeur, adulte vivant avec un handicap intellectuel

Par Louisette Pouliot, mère et citoyenne engagée

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