Mobilisation régionale contre l’abandon du projet de troisième lien
Dans une lettre ouverte rendue publique aujourd’hui, les chambres de commerce et les élus municipaux de la Chaudière-Appalaches rappellent au gouvernement de la Coalition avenir Québec (CAQ) de tenir son engagement des deux dernières élections générales par rapport à la construction d’un troisième lien entre Québec et Lévis pouvant desservir à la fois le transport en commun, les automobiles et le transport des marchandises.
Cette mobilisation regroupe l’Alliance des chambres de commerce de Chaudière-Appalaches (ACCCA), dont font partie celles de la région de Thetford et de Disraeli, ainsi que la Table régionale des élus municipaux (TREMCA), représentant 444 072 personnes réparties dans 136 municipalités du territoire. La lettre est signée par Nancy Dubé, coprésidente de l’ACCCA et directrice générale de la Chambre de commerce Kamouraska-L’Islet, Stéphan Vachon, coprésident de l’ACCCA et vice-président de la Chambre de commerce et d’industrie de la région de Thetford, et Marc-Alexandre Brousseau, maire de Thetford Mines et président de la TREMCA.
Selon eux, l’annonce de l’abandon du projet a généré de l’indignation, de la colère et du mécontentement. « La nouvelle proposition du gouvernement, qui implique uniquement le transport collectif, représente un abus de confiance majeur des électeurs et gens d’affaires de la Chaudière-Appalaches. Cette nouvelle proposition, qui ne fait aucune place à la voiture et aux camions, ne prend nullement en compte les besoins de la région exprimés à maintes reprises dans les dernières années. Nous avons besoin d’infrastructures de transport interrives efficaces et sécuritaires, qui répondent aux besoins actuels et futurs des gens d’affaires et des citoyens. Après nous avoir fait croire le contraire pendant des années, ce manque de vision du gouvernement pour soutenir le développement et l’avenir de notre région est totalement inacceptable », peut-on lire dans la lettre.
Le regroupement ajoute que l’engagement phare des candidats de la CAQ envers le troisième lien était important pour la région qui aurait notamment permis de stimuler le développement économique. « Nous avons besoin d’un projet ambitieux qui répond aux exigences de notre économie régionale en constante croissance. Nul besoin d’essayer de compenser cela en présentant un projet qui laisse de côté plusieurs villes de la Chaudière-Appalaches où le transport collectif, et même le transport interrégional, n’est pas encore assez développé. C’est grand, Lévis. C’est grand, Chaudière-Appalaches! »
Les intervenants municipaux et économiques déplorent le manque de données probantes lors de la conférence de presse de la ministre des Transports Geneviève Guilbault et soulignent que dès la campagne électorale de 2017, les candidats de la CAQ partageaient leurs observations concernant les problèmes de circulation entre les deux rives. « On s’est bien joué de nous », disent-ils.
« Nous ne pouvons accepter que ce projet soit abandonné, et encore moins être remplacé par un simple système de transport en commun. […] En plus de briser la confiance envers le gouvernement, cette nouvelle proposition comporte des risques majeurs qui pourraient avoir de graves impacts économiques pour les entreprises de la région. »
– Les élus municipaux et intervenants économiques de la Chaudière-Appalaches
Ils soutiennent que même si plusieurs entreprises ont opté pour le télétravail durant la pandémie, on constate en ce moment un retour graduel en présentiel. D’après eux, cette tendance et le fait que de nouvelles entreprises voient le jour pourraient faire en sorte que les statistiques soient rapidement obsolètes. « Pour ne plus être tenus dans l’ignorance, nous demandons au gouvernement de s’engager à mettre à jour annuellement les données de circulation et, à date fixe, de les rendre publiques. »
Ils soulèvent enfin le fait que les ponts actuels soient de plus en plus vieillissants. « Cette absence de vision du gouvernement fera stagner la région et ne soulagera en rien nos enjeux de la chaîne logistique régionale. Nous ne pouvons pas continuer à vivre dans l’incertitude quant à la sécurité de nos liens interrives. Puisque les député.es de la région n’y sont pas parvenus, nous demandons au premier ministre de respecter l’engagement qu’il a lui aussi pris et de débuter la construction d’un troisième lien qui accueillera du transport en commun, des voitures et du transport de marchandises. »
UN DOSSIER RÉGIONAL
Pour la directrice générale de la Chambre de commerce et d’industrie de la région de Thetford, Suzanne Lacombe, même si les gens d’ici ont naturellement tendance à se diriger vers le Centre-du-Québec et l’Estrie, le dossier du troisième lien entre Québec et Lévis implique tout le territoire de Chaudière-Appalaches.
« Peut-être que l’impact est moins grand pour nous, mais nos entreprises font des affaires avec les gens de la Capitale-Nationale et du pôle de Lévis. À notre avis, c’est un non-sens que le projet ne soit devenu que pour le transport collectif. Cela aurait été une opportunité pour le transport de marchandises et aussi pour les travailleurs qui ont à se déplacer entre les deux rives. Nous savons aussi que la durée de vie des ponts est en défaillance. On nous dit maintenant que nous n’aurons pas de troisième lien, c’est une décision discutable », a affirmé Mme Lacombe.
ISABELLE LECOURS EST DÉÇUE
En entretien avec le Courrier Frontenac, la députée de Lotbinière-Frontenac, Isabelle Lecours, s’est dite déçue de la décision d’abandonner le projet de tunnel Québec-Lévis pour les automobiles et le transport de marchandises. « J’ai pris connaissance de la lettre ouverte et je comprends la préoccupation des gens. »
Comme plusieurs de ses collègues de la CAQ dans la région, elle avait fait de cet engagement l’un des arguments de sa campagne. Tout en admettant que les ponts sont en effet vieillissants, elle a mentionné qu’ils sont néanmoins bien entretenus et que beaucoup d’investissements sont prévus.
Finalement, concernant la demande de l’association conservatrice de Lotbinière-Frontenac quant à sa démission par rapport à cet engagement non respecté, la députée a rappelé qu’elle avait été élue en octobre dernier pour un mandat de quatre ans et qu’elle n’avait pas l’intention de s’en aller. « Il y a beaucoup de projets dans le comté et je vais faire en sorte qu’ils se réalisent. Je ne vais pas abandonner et démissionner parce qu’il y a quelques personnes qui me le demandent. »