Des difficultés dénoncées par le personnel de l’hôpital de Thetford
Des membres du personnel de l’hôpital de Thetford dénoncent les difficultés qui persistent depuis un bon moment en raison du manque de main-d’œuvre afin de répondre à l’achalandage qui est souvent à son maximum, autant à l’urgence que sur les étages. La situation entraîne beaucoup de temps supplémentaire pour les employés qui tiennent le tout à bout de bras.
Selon Carole Mercier, présidente du Syndicat des professionnelles en soins de Chaudière-Appalaches (SPSCA-FIQ), les difficultés ne peuvent pas seulement être attribuées aux vacances puisque celles-ci se répètent aussi en dehors de la période estivale. « On nous rapporte que l’urgence est pleine et qu’ils ne peuvent plus accueillir de patients puisqu’il n’y a plus de lit. Ce n’est pas facile à Thetford Mines. Est-ce qu’ils ont le personnel pour accueillir tout ce monde-là? La réponse est non. Ça se fait à coup de temps supplémentaire. »
L’hôpital est passé près du bris de service il y a près de deux semaines, alors qu’une vingtaine de quarts étaient encore à découvert le vendredi. En plus du temps supplémentaire, ils ont dû faire venir du personnel d’autres secteurs, comme Saint-Georges, afin de les couvrir. « Les gens ne sont plus capables puisque ça revient tout le temps. Parfois, c’est l’équipe au complet qui reste en temps supplémentaire », a affirmé Mme Mercier.
Bien souvent, à ce stade, les membres du personnel ont leur journée dans le corps et la fatigue peut entrer en ligne de compte. Le plan de contingence est aussi devenu la norme, alors que cela devait plutôt être l’exception, a souligné Mme Mercier. Ça signifie qu’un secteur peut se retrouver avec une équipe en sous-effectif selon le plan qui avait été établi par la direction des soins infirmiers.
Le vieillissement de la population ainsi que l’augmentation de la clientèle font en sorte que le taux d’occupation des lits est souvent à son maximum. Ces personnes sont en attente d’une place ailleurs, comme en CHSLD. C’est ce qui entraîne une bonne partie de l’achalandage à l’hôpital.
Par ailleurs, des témoignages récemment reçus par le syndicat de la part de gens ayant voulu postuler au Centre intégré de santé et de services sociaux de Chaudière-Appalaches (CISSS-CA) le laissent perplexe. « Nous avons eu une situation où une personne a envoyé sa candidature comme externe en soins infirmiers [préposé(e) aux bénéficiaires (étudiant(e) en soins infirmiers DEC, BAC)]. Elle est aux études et elle va éventuellement devenir infirmière. Elle a reçu une réponse automatisée disant que les besoins sont comblés. Elle l’a même envoyée une deuxième fois, pensant que ça pouvait être une erreur, et elle a eu la même réponse. C’est vraiment insultant d’apprendre ça puisqu’il manque de monde partout et qu’il y a beaucoup de temps supplémentaire obligatoire (TSO) », a déploré la présidente du SPSCA.
Elle a précisé que ce n’est pas le seul témoignage en ce sens qu’elle a reçu. « En voyant ça, elles vont postuler ailleurs et nous ne les reverrons plus. C’est inacceptable, il y a des agences partout et ça leur coûte une fortune, mais ceux qui veulent bien travailler chez nous se font répondre ça. »
DES TÉMOIGNAGES INQUIÉTANTS
Le préfet de la MRC des Appalaches et maire de Thetford Mines, Marc-Alexandre Brousseau, a dit recevoir toutes sortes de témoignages en provenance de membres du personnel de l’hôpital qui sont inquiets. « Ce sont pratiquement des cris de détresse qu’on entend de la part d’employés qui tiennent à bout de bras ce qui se passe. C’est sûr que c’est inquiétant de voir que plusieurs problèmes ont l’air de s’accumuler à l’hôpital et de perdurer dans le temps. Ce qu’on veut, c’est que la population ait accès aux mêmes services de santé que n’importe où au Québec. C’était comme ça avant que cet hôpital se fusionne avec toute la région de Chaudière-Appalaches. »
M. Brousseau a dit qu’il avait l’intention de questionner encore davantage à propos de ce qui se passe à l’hôpital de Thetford. Il va falloir selon lui que des actions soient posées. « Ce qui me préoccupe comme préfet, c’est ce qui se passe ici pour nos citoyens. On ne dirait pas que les problèmes ont l’air d’avancer et de se régler. »
Malgré la mise en place il y a quelques années par le CISSS-CA d’une structure locale afin que le milieu soit mieux informé de ce qui se passe dans ses établissements de soins, cela ne s’est jamais vraiment concrétisé sur le terrain puisqu’il n’y en a pas d’information transmise, a expliqué M. Brousseau. « Celle que nous avons vient des employés vivant des problèmes. Ce que nous voulons entendre, c’est s’il y a des solutions parce que la population de la MRC des Appalaches a le droit d’avoir des services de qualité comme avant, comme on y a droit et comme ça se donne ailleurs au Québec. »
ENJEU DÉMOGRAPHIQUE
Les enjeux de main-d’œuvre sont les mêmes dans l’ensemble des établissements de la province, a observé la directrice exécutive du Réseau local de services de la région de Thetford, Marie-Josée De Montigny. « Nous avons un achalandage important, ce qui est le cas aussi ailleurs, mais chez nous la population est vieillissante. Ce que nous vivons est également démographique. Ces personnes sont plus propices à développer différentes maladies. Cela amène une pression sur le système, sur le personnel et sur les gestionnaires. Cette situation devrait se poursuivre encore dans les prochaines années selon les statistiques que nous avons. »
Mme De Montigny a mentionné que plusieurs actions sont posées afin de pallier le problème. L’organisation mise notamment sur la collaboration des équipes. L’appel au personnel d’autres secteurs, comme ce fut le cas récemment, est l’une des dernières mesures permettant de combler les quarts de travail. « C’est un exercice de tous les instants, nous sommes constamment en train de planifier afin de les pourvoir. Cela nous permet de voir les situations arriver un peu à l’avance. Nous utilisons aussi les outils à notre disposition. Il y a beaucoup de travail qui est fait en amont. »
La directrice exécutive a affirmé que l’organisation sait que la situation est difficile pour le personnel. « Nous avons fait une tournée en avril afin de rencontrer les équipes de jour, de soir et de nuit, ainsi que le syndicat et les gestionnaires près du terrain afin d’entendre leurs préoccupations et de trouver des solutions. Nous essayons de plus en plus de travailler de cette façon. C’est là que nous avons des gains importants. Il y a de petits miracles qui se font à tous les jours avec le personnel et les gestionnaires », a-t-elle relaté.
Quant au temps supplémentaire, il y a aussi des gens qui en demandent et qui l’inscrivent dans le logiciel prévu à cet effet, a-t-elle souligné. « Nous ne préconisons par le TSO, c’est une stratégie de dernier recours. Quand nous en sommes rendus là, c’est que nous avons épluché une tonne de choses. Nous tentons de ne plus en avoir besoin puisque c’est difficile pour le personnel. »
En ce qui concerne l’information obtenue par le syndicat à propos de la réponse du CISSS-CA à une candidature au poste de préposé(e) aux bénéficiaires (étudiant(e) en soins infirmiers DEC, BAC), cela peut s’expliquer selon plusieurs facteurs et il est difficile de juger de ce cas en particulier sans avoir les détails, a indiqué Mme De Montigny. « La direction des ressources humaines fait des pieds et des mains pour recruter des gens qualifiés, puis on leur dirait qu’on n’en a pas besoin? Je serais très étonnée de ça. »
Elle a précisé que la situation en ce qui concerne les préposées aux bénéficiaires a changé et que les enjeux de personnel se retrouvent davantage du côté des postes d’infirmières et d’infirmières auxiliaires.