Thetford Mines montrée du doigt pour ses rejets d’eaux usées dans l’environnement

La Ville de Thetford Mines est montrée du doigt par la Fondation Rivières quant au nombre de rejets d’eaux usées sans traitement dans la rivière Bécancour. Selon un palmarès publié le jeudi 26 octobre, pas moins de 8813 déversements ont eu lieu entre 2017 et 2022, dont 1856 seulement l’année dernière. Il s’agit du nombre le plus élevé au cours de cette période. La situation s’est produite sur 209 jours distincts, pour un total de 15 620 heures.

Parmi toutes les villes et municipalités de la province, Thetford Mines, La Tuque et Lacolle présenteraient les dégradations les plus importantes.

Les données publiées par la Fondation Rivières proviennent du ministère de l’Environnement. Chaque année, les administrations municipales ont l’obligation de lui fournir le nombre de déversements et les performances de leurs stations d’épuration. « Dans le cas de Thetford Mines, nous ne pouvons plus parler de malchance. Il est question de pattern. Depuis 2017, le nombre a augmenté énormément. Ça va de mal en pis. C’est ce que le palmarès nous permet de voir. De plus, ces données sont représentatives de ce qu’il se passe parce que tous les ouvrages ont des capteurs qui enregistrent la quantité de déversements », a mentionné au Courrier Frontenac le directeur général de la fondation, André Bélanger.

Ceux-ci surviennent lors d’épisodes de fortes pluies et pendant la fonte des neiges au printemps. « Thetford Mines est une vieille ville. Dans certains secteurs, il y a des réseaux unitaires. Cela veut dire que les eaux sanitaires et pluviales se mélangent et sont dirigées vers la station d’épuration dans le même tuyau. Quand il y a beaucoup d’eau, celui-ci ne peut pas tout l’apporter à la station d’épuration, alors pour éviter que les citoyens soient inondés, la station de pompage fait son travail et déverse dans l’environnement un mélange d’eaux usées et de pluie », a-t-il expliqué.

À son avis, les nombreux stationnements ont aussi un impact puisqu’ils contribuent à la quantité d’eau de pluie se retrouvant dans le réseau sanitaire. « La solution pour une ville passe par trois étapes, la première est de séparer les réseaux. Tu fais cela quand tu dois réaliser des travaux majeurs, mais tu peux aussi réduire le tout à la source. Dans le cas de Thetford Mines, ce serait d’identifier les endroits où il y a le plus de déversements. Tu peux y installer des bandes végétalisées, diriger cette eau vers du gazon ou la dévier vers des ouvrages de trop-plein pour qu’elle puisse s’écouler plus lentement. Les villes et les municipalités doivent être adaptées pour les surplus d’eau. Elles ont d’ailleurs besoin de revoir l’urbanisme lorsqu’elles développent un nouveau quartier ou un parc, à titre d’exemple. »

Le directeur général de la Fondation Rivières s’attend à ce que le nombre de déversements des eaux usées sans traitement dans l’environnement pour l’année en cours soit une fois de plus élevé. « Nous avons tous connu un été pluvieux. La tendance à long terme est aux phénomènes météo extrêmes. Cela représente un gros défi. Les villes et les municipalités ne pourront probablement jamais complètement empêcher tous les déversements, mais si elles ne font rien maintenant, dans quelques années cela va juste augmenter. »

LE MAIRE RÉPOND

Appelé à commenter la sortie de la Fondation Rivières, le maire de Thetford Mines, Marc-Alexandre Brousseau, a affirmé n’avoir aucune gêne par rapport aux données présentées. « La première chose qu’il faut noter, c’est que l’on parle de la quantité de déversements, mais pas du volume d’eau rejeté parce que les capteurs placés aux différents ouvrages ne permettent pas de comptabiliser cette donnée. Par contre, nous avons tellement investi dans les dernières années pour séparer nos réseaux sanitaire et pluvial, nécessairement, le volume est moins élevé lorsque cela se produit. »

Il a tenu à préciser que, contrairement à d’autres grandes villes comme Montréal, Thetford Mines ne fait pas de déversement massif. « Il faut également savoir que d’autres petites municipalités au Québec déversent encore 100 % de leurs eaux usées dans les rivières, et ce, tous les jours. En 2023, cela est assez incroyable! J’espère qu’elles seront également regardées. »

Marc-Alexandre Brousseau a rappelé que son administration a investi à ce jour une somme de 17,6 millions $ pour s’attaquer au problème, en plus d’un montant de 4,9 millions $ pour l’usine de désinfection aux ultraviolets à la sortie de la station d’épuration. « Actuellement, des projets totalisant plus de 20 millions $ ont déjà été acceptés et vont se faire en 2024 ou 2025. Nous mettrons en place un bassin de rétention dans le secteur St-Noël. Nous avions déjà essayé de le réaliser par le passé, mais le financement gouvernemental n’était pas assez généreux. Ça fait longtemps que les plans et devis sont prêts. Québec vient de lancer un nouveau programme qui accorde un plus grand pourcentage de subvention et nous irons de l’avant. »

Il soutient que la Ville de Thetford Mines a un plan avec le ministère de l’Environnement qui est très bien suivi. « Je considère que nous y allons même plus rapidement que prévu avec des investissements massifs. Si jamais la Fondation Rivières a de l’argent pour nous, cela va nous faire plaisir de l’utiliser. »

Quant à l’idée de revoir l’urbanisme lors de futurs développements, Marc-Alexandre Brousseau estime qu’il s’agit d’un très beau discours pour les villes se trouvant dans la région de Montréal et qui sont en forte croissance. « Je pense que M. Bélanger ne savait pas où il appelait quand il a dit cela. Il ne se développe pas des quartiers ici comme il s’en fait dans d’autres secteurs dans la province. C’est marginal par rapport à tout le reste », a-t-il conclu.

NOMBRE DE DÉVERSEMENTS À THETFORD MINES

2017 : 1086

2018 : 1533

2019 : 1552

2020 : 1571

2021 : 1215

2022 : 1856