Vague de cambriolages : la police fait le point sur l’enquête
THETFORD – Alors que Derek Carrier a été formellement accusé d’avoir commis un total de 124 introductions par effraction à Thetford et à Sherbrooke, la Sûreté municipale a convoqué une conférence de presse pour faire le point sur l’enquête.
Rappelons que Carrier a été formellement accusé de 124 chefs d’introduction par effraction dans une maison d’habitation pour commettre un acte criminel, mercredi dernier au Palais de justice de Sherbrooke. De cet impressionnant total, 77 introductions ont été perpétrées à Thetford.
Les faits reprochés ont été commis entre octobre 2012 et août 2013, à Thetford, et entre août et novembre derniers, à Sherbrooke. Le dossier de l’accusé reviendra à la Cour lundi pour la suite des procédures. Si un procès devait être tenu, il le serait à Sherbrooke.
Lors de la rencontre avec les médias, le directeur de la Sûreté municipale, François Gagnon, a d’abord souligné l’importance d’expliquer le déroulement de l’enquête aux Thetfordois étant donné « qu’il y a eu beaucoup de victimes et que ça a créé de l’inquiétude dans la population. »
M. Gagnon explique que la vague de cambriolages a été « dure à vivre » par le corps de police. « Notre personnel a travaillé extrêmement fort au cours de la dernière année. Il y a des choses dont on ne peut pas se vanter d’avoir fait car, pour les besoins de l’enquête, certains aspects ne peuvent pas être dévoilés publiquement », a-t-il fait savoir.
Le chef policier a aussi tenu à réitérer que ce n’est pas le Service de police de Sherbrooke qui a résolu les crimes perpétrés à Thetford. « Sherbrooke nous a aidés parce que leur dossier s’enligne dans le nôtre et on a aidé Sherbrooke car ils ont été capables de prendre les plaintes dans leurs 47 dossiers grâce aux preuves qu’on avait. Ce n’est donc pas un coup de chance », a-t-il insisté.
De nombreuses techniques d’enquête
M. Gagnon a décrit les différentes techniques d’enquête qui ont été utilisées pour identifier l’accusé. La Sûreté municipale a premièrement eu recours aux services spécialisés de la Sûreté du Québec. « On a fait affaire avec les services d’identité judiciaire. Les victimes le savent puisque des experts ont analysé les scènes de crime », a-t-il mentionné.
« On a aussi utilisé des "line-up" photographiques, c’est-à-dire des parades d’identification, a poursuivi le directeur. Il y a ensuite eu des perquisitions, des services de filature et de la patrouille dirigée avec des véhicules fantômes. De plus, on a créé un programme de surveillance de quartier pour rendre les cibles plus difficiles. »
M. Gagnon a également fait référence à une technique qui n’avait été utilisée qu’à deux reprises dans l’histoire policière québécoise, à savoir le profilage géographique. « On a fait venir deux spécialistes de la SQ qui ont traité toutes les données des vols pour identifier un profil d’individu, par exemple pour connaitre son secteur de résidence. Cette technique a donné de bons résultats », a-t-il indiqué.
Par ailleurs, des visites de domiciles ont été effectuées pour tenter d’obtenir de nouvelles informations, entre autres à Ste-Marthe, le quartier le plus touché par les vols. « Pendant un mois de temps, trois policiers ont cogné à toutes les portes », a mentionné le chef policier.
Enfin, le corps de police a eu recours au renseignement criminel. Au moment où la vague d’introductions s’est estompée, les enquêteurs soupçonnaient que l’individu avait quitté la région, ce qui était en effet le cas. « On a alors monté une fiche pour décrire le modus operandi du cambrioleur. En ayant identifié sa "signature", on avait déjà été capable de relier les 77 vols. La fiche a ensuite été envoyée à tous les services de police », a-t-il rappelé.
C’est grâce à cet outil que le Service de police de Sherbrooke a fait parvenir des éléments d’informations à la Sûreté municipale de Thetford et qu’il a été possible de conclure que l’auteur des deux séries de crimes était le même individu. « Ça a été un travail d’équipe », a signalé François Gagnon.
Un corps policier soulagé
Même si Derek Carrier n’a pas encore été reconnu coupable, la Sûreté municipale est soulagée et a le sentiment du devoir accompli. « C’était une pression pour nous, partage M. Gagnon. Maintenant l’homme est détenu et la population peut être rassurée. La "game" vient de finir. »
Il va sans dire que la Sûreté municipale de Thetford a été discréditée par plusieurs citoyens au cours des derniers mois, en raison de la durée de l’enquête et de la prolifération des délits. Le directeur reconnait toutefois que la population est en droit de critiquer son service de police, surtout que la crainte vécue par les citoyens était justifiée. « Quoiqu’on ne parlait pas beaucoup, on a travaillé fort. Tout le personnel a mis la main à la pâte et ça ne nous a pas empêchés d’assumer nos autres responsabilités », a-t-il fait valoir fièrement.
Les propos du directeur sont d’ailleurs confirmés par le procureur en charge du dossier, Me Andy Drouin. Il a déclaré que c’est en raison du travail méticuleux et de la collaboration entre les services de police que des accusations ont pu être portées à l’endroit de Carrier.
En bout de course, le chef policier tient à remercier la population thetfordoise pour sa coopération puisque plusieurs des informations communiquées par celle-ci ont aidé à la conduite de l’enquête. Il confirme également qu’il s’agit du dossier qui a sollicité le plus de temps et le plus de ressources au cours de sa carrière à la Sûreté municipale. « J’ai envie de dire qu’en 31 ans c’est pas mal la pire période que le service de police a vécue, même si ce n’était pas les crimes les plus graves », a-t-il confié.