Une histoire de persévérance hors du commun

Sa ténacité, son endurance et sa résilience ont permis à Audrey Lessard de réaliser plusieurs de ses objectifs. Première personne sourde à obtenir un doctorat en médecine podiatrique, la Thetfordoise a dû se battre afin de faire sa place. C’est ce qui ressort de son premier livre intitulé « La route de l’impossible ». En plus de son histoire, celui-ci raconte celles d’autres personnes sourdes et malentendantes qui, comme elle, ont mené leur propre bataille.

Ce projet d’écriture est un rêve que l’auteure caressait depuis très longtemps. « J’en parlais déjà au Cégep. Au fil des années, c’est toujours resté dans mon cœur, mais avec les études, le travail et la clinique, ce n’était pas évident. J’avais de petits brouillons, des notes et des idées un peu partout, mais je n’avais pas nécessairement pris le temps de tout mettre dans le même panier. La pandémie m’a toutefois donné le coup de pied qu’il me fallait pour mettre mon vieux projet à exécution », a affirmé la fondatrice de la Clinique podiatrique des Appalaches par l’entremise de son assistante-interprète, Josée Cyr.

Audrey Lessard considère Josée Cyr, son assistante-interprète depuis 2013, comme son alter ego, son précieux bras droit, une amie ainsi que l’une des personnes les plus importantes dans sa vie. (Photo Courrier Frontenac – Claudia Fortier)

Audrey Lessard est cependant heureuse de ne pas l’avoir fait avant, jugeant qu’elle n’aurait pas eu l’expérience qu’elle a acquise avec les années. « Les missions humanitaires, les ascensions en haute montagne et le défi de la gestion d’une clinique, j’ai pu tout mettre dans le même livre. »

La préface est signée par Dr Dominique Dorion, doyen de la faculté de médecine de l’Université de Sherbrooke. Sa rencontre a été déterminante pour Audrey puisqu’il a participé à régler son problème d’implant cochléaire.  » Souvent, les gens me demandent pourquoi je n’ai pas d’implant. Ils ne savent pas que j’en ai déjà eu un à l’âge de 9 ans et que ce fut un échec. J’ai porté l’appareil externe pendant un an environ. On m’a finalement retiré la partie interne en 2011. »

En plus de cette période, la Thetfordoise de 39 ans raconte comment sa famille et ses amis proches l’ont soutenue, son cheminement scolaire – elle a toujours su qu’elle voulait être dans le domaine de la santé – qui n’a pas toujours été évident, l’importance de la langue des signes québécoise (LSQ) dans la société, son ascension du mont Kilimandjaro et du camp de base de l’Everest, ses missions humanitaires au Vietnam et au Pérou ainsi que bien d’autres aspects de son parcours de vie hors du commun.

« Ce n’est pas seulement mon histoire, a-t-elle tenu à préciser. Il y a aussi des témoignages d’une dizaine de personnes sourdes et malentendantes qui ont réussi. Je désire que les lecteurs découvrent la perception d’autres gens par rapport au handicap de la surdité. »

Dans son livre, elle explique également pourquoi elle considère d’une importance primordiale l’apprentissage du français écrit pour la communauté sourde. « Pour moi, apprendre le français, l’anglais ou toute autre langue écrite, c’est une porte pour l’accessibilité à l’éducation, aux connaissances, à l’actualité, à tout en fait. J’encourage beaucoup la diversité au niveau des langues pour que les gens soient en mesure de bien s’intégrer à la société. Quand j’ai commencé mes études en pharmacologie à l’Université de Sherbrooke en 2003, il y avait beaucoup de termes scientifiques très longs et aucun signe pour représenter ceux faisant partie de la terminologie médicale plutôt complexe. Comment une personne sourde qui maîtrise moins bien le français écrit peut-elle apprendre ces termes médicaux de façon précise et sans difficulté ? Il en est ainsi dans tous les autres domaines dont le vocabulaire est plus élargi. »

Bien qu’elle pousse beaucoup en ce sens, Audrey est consciente qu’une partie de la communauté sourde est plus ou moins en faveur. Selon elle, la raison principale est que plusieurs craignent que la LSQ se perde, notamment puisqu’il y a de plus en plus de gens avec des implants. « Pour moi, les deux sont très importants, autant la LSQ que l’apprentissage du français écrit. C’est ce que je tente d’expliquer dans mon livre. »

Qu’est-ce qu’elle veut que les gens retiennent de leur lecture? « L’importance de la résilience, de la persévérance, de l’éducation, du soutien de la famille, d’écouter notre cœur, de suivre nos rêves et de faire la sourde oreille aux gens qui essaient de nous dissuader de faire ce que l’on aime. »

« La route de l’impossible » sera disponible à la Librairie L’Écuyer à Thetford Mines le 28 janvier. Il est aussi possible de le télécharger en version numérique via Amazon et Kobo.