Des experts recommandent au moins quatre heures de soins directs par jour en CHSLD

OTTAWA — Le gouvernement libéral doit inscrire dans la loi de nouvelles normes nationales pour les foyers de soins de longue durée s’il veut respecter un engagement de l’entente de soutien et de confiance conclue avec le NPD, a déclaré mardi le porte-parole néo-démocrate en matière de santé.

Un groupe d’experts de l’Organisation des normes de santé (ONS) a publié mardi une mise à jour des directives proposées pour les soins de longue durée au Canada, à la lumière du bilan mortel et tragique que la pandémie de COVID-19 a fait subir à ces résidents et à leur qualité de vie.

Les nouvelles normes proposées par cet organisme à but non lucratif, qui ne sont pas appliquées actuellement, prévoient que les résidents reçoivent chaque jour au moins quatre heures de «soins directs» et que ceux qui travaillent auprès d’eux soient mieux payés.

Dans le cadre de l’entente conclue en mars avec le NPD pour que ce parti soutienne le gouvernement minoritaire lors des votes de confiance aux Communes jusqu’en 2025, les libéraux se sont engagés notamment à faire adopter «une loi sur les soins de longue durée sécuritaires».

Le gouvernement libéral ne s’est pas encore engagé à légiférer sur les normes, mais le ministre fédéral de la Santé, Jean-Yves Duclos, a déclaré que les consultations sur le nouveau projet de loi commenceront dans les «prochains mois».

Le député néo-démocrate Don Davies, porte-parole de son parti en matière de santé, a déclaré mardi que les nouvelles normes proposées par l’ONS doivent constituer le fondement de cette loi promise.

«Si les soins doivent être sécuritaires, ces normes doivent figurer dans la loi», a déclaré M. Davies à l’extérieur de la Chambre.

Champs de compétence

Il s’agit en tous cas d’un terrain délicat pour le gouvernement fédéral, puisque les soins de longue durée sont de compétence provinciale.

Le premier ministre Justin Trudeau a déjà indiqué que le gouvernement fédéral discutait avec les provinces et territoires de nouvelles normes pour la qualité, la conception et le fonctionnement des centres de soins de longue durée partout au Canada.

Il a reconnu mardi que les provinces étaient responsables de la prestation et de la réglementation des soins, mais il a souligné que tous les Canadiens souhaitaient que les soins aux aînés soient tenus aux normes les plus élevées. «C’est ce sur quoi nous allons continuer à travailler», a déclaré M. Trudeau en se rendant à la réunion hebdomadaire du cabinet.

Les experts de l’ONS ont précisé que les nouvelles normes ne seront utiles que si le gouvernement les met en pratique et s’assure qu’elles sont respectées. Le docteur Samir Sinha, qui a dirigé le comité technique d’experts sur les nouvelles normes, estime qu’elles pourraient devenir la base des lois provinciales, de politiques publiques et d’autres mesures de responsabilisation.

Pour l’instant, chaque province établit ses propres règles sur l’agrément, le fonctionnement et l’inspection des soins de longue durée, créant un système disparate à travers tout le pays pour régir la façon dont les établissements doivent être conçus, exploités et entretenus.

M. Trudeau a promis lors de la campagne électorale de 2021 de légiférer sur la sécurité dans les soins de longue durée dans tout le pays. Les libéraux ont réitéré cette promesse en signant l’entente de soutien et de confiance avec les néo-démocrates, mais le gouvernement n’a pas précisé jusqu’ici ce que cette loi impliquerait.

«Nous allons continuer à travailler avec les provinces et les territoires dans leurs efforts pour soutenir ces normes de soins de longue durée dans leurs propres communautés», a déclaré la ministre des Aînés, Kamal Khera, mardi, à sa sortie de la réunion du cabinet.

Ententes bilatérales ?

Son collègue Duclos a suggéré que le gouvernement pourrait signer des ententes bilatérales avec des provinces pour faire appliquer de nouvelles normes nationales.

Le gouvernement a réservé 3 milliards $ dans le budget de 2021 pour aider les provinces et territoires à appliquer les normes en matière de soins de longue durée, à augmenter les salaires et à améliorer les ratios personnel-patients. «Maintenant, nous avons hâte de signer des accords avec les provinces et les territoires pour voir comment ils peuvent utiliser ces dollars pour mieux respecter ces nouvelles normes», a déclaré M. Duclos.

Mais il faudra probablement beaucoup plus d’argent pour mettre en œuvre les nouvelles normes. En 2021, le directeur parlementaire du budget a estimé qu’il en coûterait 4,3 milliards $ de plus par année simplement pour offrir aux patients au moins quatre heures de soins quotidiens, comme le recommande maintenant l’ONS.

Le député Davies a déclaré que le NPD serait probablement flexible sur la façon dont les normes seront appliquées par les provinces. «Je pense que ce qui intéresse vraiment les Canadiens, c’est de s’assurer que leurs proches ou leurs aînés sont correctement pris en charge dans les foyers de soins de longue durée, a-t-il dit. Je ne pense pas qu’ils se soucient vraiment autant du cadre.»

Certaines provinces exigent déjà que les foyers de soins de longue durée soient accrédités selon les normes de l’ONS, tandis que d’autres s’appuient sur un engagement volontaire de chaque établissement.

L’ONS s’attend à ce qu’environ 68 % des foyers de soins de longue durée au Canada soient accrédités sur une base volontaire ou obligatoire en utilisant les nouvelles normes. Mais le docteur Sinha prévient que l’accréditation ne suffira pas: il faudra voir au respect des nouvelles normes. 

Conception et construction

Par ailleurs, et parallèlement aux travaux de l’ONS, de nouvelles lignes directrices pour la conception des foyers de soins de longue durée et des pratiques de prévention des infections ont été publiées le mois dernier, cette fois par le Groupe CSA — anciennement l’«ACNOR».

Les normes du Groupe CSA couvrent tout, du nombre de résidents qui doivent partager une chambre aux matériaux utilisés pour construire le bâtiment. 

Ces normes sont strictement volontaires pour l’instant, mais les experts qui ont élaboré ces normes de construction espèrent qu’elles seront rapidement incluses dans les réglementations ou les lois.

«Le temps presse, car il y a des projets partout au pays pour construire de nouveaux foyers de soins de longue durée», a déclaré Alex Mihailidis, qui a présidé le comité du Groupe CSA.