L’Alberta apportera des modifications à son projet de loi sur sa «souveraineté»

EDMONTON — Le gouvernement albertain planche sur des changements, qui seront débattus la semaine prochaine, afin d’amender les dispositions actuelles du projet de loi sur la «souveraineté» de la province qui donneraient le pouvoir au cabinet de réécrire des lois à huis clos, sans devoir passer par l’Assemblée législative.

C’est ce qu’a affirmé la première ministre albertaine, Danielle Smith, lors d’une entrevue à la radio samedi. Elle a soutenu que le projet de loi ne devait pas donner de tels pouvoirs au conseil des ministres et que son gouvernement est déterminé à préciser que le cabinet n’aura pas le droit de réécrire des lois en privé.

«On ne peut rien réussir à 100 % du premier coup, a reconnu Mme Smith. Je crois qu’il y a un peu de confusion dans tout ça, donc nous travaillons sur des amendements qui vont clarifier le tout.»

Le projet de loi, déposé cette semaine, a été accueilli très froidement, puisqu’une fois adopté, il donnerait à Mme Smith et à son cabinet le pouvoir de révoquer toute politique, loi ou tout programme fédéral qu’ils jugent nuisibles aux intérêts de l’Alberta.

Plusieurs personnes ont critiqué le fait qu’un tel pouvoir exercé à huis clos, sans la surveillance de l’Assemblée législative, constitue une menace pour les principes de poids et contrepoids essentiels dans une démocratie saine.

Le projet de loi a également suscité des inquiétudes concernant la disposition qui accorde au conseil des ministres le droit d’ordonner aux entités légiférées ou financées par la province de rejeter les lois fédérales.

Ces entités comprennent les municipalités, les forces policières, les régions sanitaires, les établissements d’enseignement postsecondaire et les commissions scolaires.

Dans les jours qui ont suivi le dépôt du projet de loi, Mme Smith et les membres de son cabinet ont répété haut et fort que le la nouvelle loi ne donnait pas de pouvoirs unilatéraux au conseil des ministres pour modifier des lois.

Mais vendredi après-midi, la première ministre a reconnu, en entrevue avec CBC, que des changements pourraient être nécessaires. Samedi matin, elle a confirmé que des modifications seraient apportées.

«Certaines personnes sont inquiètes que le projet de loi soit écrit d’une manière qui laisse penser que le conseil des ministres pourrait changer unilatéralement des lois, mais nous ne pourrons pas faire ça, a assuré Mme Smith en entrevue à la radio. Si nous voulons modifier des lois (une fois le projet de loi adopté), nous devrons revenir devant l’Assemblée législative. Nous travaillons pour que cette précision soit apportée.»

La première ministre albertaine a ajouté que ces amendements seront débattus la semaine prochaine et qu’elle vise une approche «équitable».

«Si nous avons causé une certaine confusion avec une formulation maladroite, alors changeons-la pour pouvoir parler des questions plus importantes», a-t-elle tranché.

Mme Smith a lancé l’idée d’un projet de loi sur la «souveraineté» de l’Alberta en juin.

Elle l’a qualifié d’outil délibérément conflictuel pour rétablir la relation avec un gouvernement fédéral qu’elle accuse d’ingérence dans des champs de compétence des provinces, comme le développement énergétique et les soins de santé.

En vertu de cette nouvelle loi, le conseil des ministres aurait le pouvoir de déterminer si Ottawa s’ingère dans une compétence de l’Alberta par le biais d’une loi, d’une politique ou d’un programme qui, selon lui, pourrait causer du tort à la province.

Le conseil des ministres enverrait alors une résolution à l’Assemblée législative, précisant la nature du préjudice et les façons d’y remédier.

Si la législature adopte la résolution, son implication prend fin et que le cabinet prend le relais. Le cabinet pourrait à ce moment utiliser les pouvoirs extraordinaires du projet de loi pour réécrire la législation et ordonner aux entités provinciales d’ignorer les lois fédérales en fonction de ce qu’il juge être «nécessaire ou souhaitable».

Mme Smith n’a pas précisé comment elle utilisera le projet de loi. Elle a oscillé ces derniers jours entre dire qu’il s’agit d’une mesure de dernier recours et dire qu’elle espère commencer à l’utiliser dès le printemps.