Le partage de données en santé aussi mis en cause par la vérificatrice générale

OTTAWA — L’absence d’entente entre Ottawa et les provinces sur l’échange de données en matière de santé est identifiée par la vérificatrice générale du Canada, Karen Hogan, comme l’un des éléments ayant «nui à (la) capacité de réduire le gaspillage de vaccins» contre la COVID-19.

Dans l’un de ses deux rapports déposés mardi au Parlement, elle note qu’elle et ses prédécesseurs ont déjà «soulevé les problèmes d’échange de données sur la santé entre les autorités de santé fédérale, provinciales et territoriales en 1999, en 2002, en 2008 et, plus récemment, en 2021».

«Dans le présent audit, nous avons constaté que ces  problèmes de longue date nuisaient à l’efficacité de la communication, par l’Agence de la santé publique du Canada, de données détaillées à l’échelle des cas sur la surveillance de la sécurité à Santé Canada, à l’Organisation mondiale de la santé et aux compagnies de vaccins», peut-on lire dans le nouveau rapport.

L’une des principales conclusions de l’analyse menée par la vérificatrice générale est que «les efforts déployés par l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC) pour réduire le plus possible le gaspillage avaient été infructueux».

On peut y lire que des dizaines de millions de doses de vaccins expireront probablement et devront être jetées, une perte qui pourrait atteindre environ un milliard $ selon les estimations du bureau de la vérificatrice générale.

La déficience du partage de données entre les gouvernements provinciaux et fédéral a aussi «nui à la capacité de l’agence de communiquer avec efficacité des données détaillées et désagrégées sur la surveillance de l’innocuité des vaccins à Santé Canada, à l’Organisation mondiale de la santé et aux fabricants de vaccins», a constaté l’équipe de Mme Hogan.

Ce système de partage d’information est en cause dans un tout autre dossier, c’est-à-dire celui des discussions qui achoppent entre les provinces et Ottawa sur une éventuelle augmentation des transferts fédéraux en santé.

En marge d’une récente rencontre tenue à Vancouver avec ses vis-à-vis des provinces, le ministre fédéral de la Santé, Jean-Yves Duclos, avait demandé à ce que les provinces acceptent l’utilisation d’indicateurs de santé communs ainsi que la création d’un système de données sur la santé de «classe mondiale» pour le pays.

Questionné sur ce point mardi en mêlée de presse, M. Duclos a réitéré qu’«on est en 2022 au Canada» et que «notre système de données en santé (est) un système de classe médiocre».

«Ce qu’il faut faire, maintenant, c’est d’accélérer le partage d’informations des provinces et territoires vers le gouvernement canadien pour que l’ASPC puisse mieux planifier et mieux utiliser les doses de vaccin qui sont disponibles», a-t-il affirmé dans le foyer de la Chambre des communes.

Il a confirmé qu’il s’agit «essentiellement de la même chose» qu’il a mentionnée, il y a quelques semaines, à Vancouver.

«Les vaccins, les traitements, les médicaments, les équipements, les techniques cliniques», a-t-il énuméré en guise d’exemples de ramifications.

«On devrait être davantage capable au Canada de partager et d’utiliser ces informations importantes pour les gouvernements», a poursuivi le ministre Duclos.

La vérificatrice générale, lorsqu’interpellée sur l’enjeu du partage de données, a dit ne pas être en mesure de préciser si le problème de partage d’informations était davantage imputable, selon son analyse, aux provinces ou au fédéral.

«Le manque d’une entente pancanadienne pour partager de l’information est vraiment quelque chose que ça fait (…) presque 25 années que nous, comme bureau, nous avons identifié comme un problème, a-t-elle répondu. Et je me questionne (à savoir) combien d’autres urgences sanitaires il faudra (traverser) comme pays avant que l’on puisse trouver une solution.»

M. Duclos a affirmé qu’avant la pandémie, le blocage se situait «entre autres au point de vue de la technologie pour permettre de partager les informations», mais que cela n’était plus un point d’achoppement à l’heure actuelle.

Le gouvernement québécois de François Legault a dit être prêt à discuter de partage d’informations en matière de santé.

«On a toujours dit que le fédéral devait augmenter les transferts en santé et qu’on demeure ouvert de présenter à M. Duclos nos données qui sont déjà publiques pour l’ensemble des Québécois», a déclaré, dans un courriel récemment envoyé à La Presse Canadienne, le bureau du ministre de la Santé du Québec, Christian Dubé.

Les provinces réclament d’Ottawa, depuis plusieurs années, une hausse significative et récurrente des transferts en santé, et ce, sans condition.

– Avec des informations de Laura Osman