Les prévisions de pluie sont encourageantes pour l’Abitibi, moins pour Chibougamau

MONTRÉAL — Les projections de précipitations sur cinq jours, dévoilées vendredi par Environnement Canada, laissent entrevoir un répit pour l’Abitibi dans la lutte aux incendies de forêt, mais sont décevantes pour les secteurs de Chibougamau et Lebel-sur-Quévillon.

Le météorologue Gerald Cheng a toutefois rappelé que les prévisions étant sur cinq jours, elles pourraient encore changer. «Vous pouvez voir que la quantité de pluie (jusqu’à) mardi sera en général de 10 à 20 millimètres de pluie», a-t-il résumé en parlant notamment des régions de Chibougamau et Lebel-sur-Quévillon.

Pour l’Abitibi, les projections font état de précipitations plus abondantes, soit entre 40 et 90 millimètres selon les endroits. Cependant, les projections qui dépassent 80 millimètres pourraient être surestimées, selon le météorologue, parce qu’il est possible qu’il y ait des orages et «s’il y en a, la quantité de pluie pourrait être (…) très intense, mais très isolée», a-t-il expliqué.

Compensations

Pendant ce temps, Québec annonce que les citoyens qui ont dû évacuer leur résidence en raison des incendies de forêt recevront une compensation de 1500 $, quelle que soit la durée de leur évacuation.

Le ministre de la Sécurité publique, François Bonnardel, a aussi précisé que la totalité des dépenses encourues par les municipalités et les organismes comme la Croix-Rouge sera aussi remboursée.

Au total, 13 520 citoyens demeurent évacués, dont plus de 7400 de Chibougamau et 2000 de Lebel-sur-Quévillon. Une cinquantaine de détenus de la prison d’Amos ont aussi été évacués, par mesure de prévention, a précisé M. Bonnardel. «On voulait s’assurer avec ce centre de détention que si les feux se rapprochaient, on soit capable de répondre rapidement.»

Le ministre responsable des Relations avec les Premières Nations, Ian Lafrenière, a signalé de son côté qu’il y a présentement sept communautés autochtones qui sont plus durement touchées, soit trois communautés algonquines, une communauté atikamekw et trois communautés cries.

Les compensations annoncées par Québec ne s’appliquent pas à elles, a expliqué le ministre Lafrenière. «Les membres qui restent dans ces communautés, c’est Services aux Autochtones Canada qui vont s’occuper d’eux. J’ai parlé à ma collègue Patty Hajdu, ce matin. Elle m’a confirmé que les Premières Nations ne seront pas oubliées.»

À Québec, le premier ministre François Legault a tenu à saluer la solidarité des Québécois en cette période de crise. «Je suis très chanceux de pouvoir compter sur des gens dévoués, mais aussi sur un peuple qui est tissé serré», a-t-il dit alors qu’il dressait le bilan de la session parlementaire. «Je suis toujours impressionné de voir l’accueil des Québécois quand ça ne va pas bien. On a vraiment une solidarité qui est exemplaire.»

Des vents faibles

Pendant ce temps, sur le terrain,la lutte contre les immenses incendies de forêt se poursuit et malgré l’absence de pluie, la météo collabore un peu peur ralentir la progression des feux, a expliqué le ministre Bonnardel. «Il y a des vents quand même assez faibles présentement, ce qui fait que les principaux feux, celui de Chibougamau est encore à une quinzaine de kilomètres (des communautés), celui de Lebel-sur-Quévillon à une quinzaine de kilomètres.»

«La pluie va nous aider à partir de lundi soir, a-t-il rappelé. On va espérer que Dame météo nous aide.»

L’arrivée d’une centaine de pompiers français et d’une cinquantaine d’autres du Nouveau-Brunswick, qui sont tous déployés ou sur le point de l’être, vient aussi donner un sérieux coup de main dans ce combat contre les éléments. Environ 300 autres pompiers forestiers venant des États-Unis, du Portugal et d’Espagne sont attendus en début de semaine prochaine.

«L’arrivée de nouvelles forces vives sur le terrain permet à la SOPFEU de nous mentionner que la phase de sprint, elle est terminée, qu’on est maintenant dans la phase marathon», a imagé la ministre des Ressources naturelles et de la Forêt, Maïté Blanchette Vézina. L’objectif des prochains jours et les prochaines semaines, a-t-elle dit, sera «de contenir les feux actifs, s’assurer de les contenir, de les maîtriser pour finalement les éteindre».

Pas moins de 648 000 hectares de forêt sont affectés par plus de 140 incendies dans la zone intensive, soit 14 fois la superficie de l’île de Montréal, mais si on y ajoute les feux qui ravagent les zones nordiques, où la SOPFEU n’est pas en intervention, c’est un total de 876 000 hectares de forêt qui sont affectés.

Réouverture des forêts sur la Côte-Nord

En contrepartie, la pluie qui s’est abattue sur la Côte-Nord permet maintenant de lever l’interdiction de circuler dans la forêt publique dans cette région. Les feux à ciel ouvert y sont toutefois toujours interdits, tout comme les travaux forestiers. 

Les employés des entreprises forestières pourront donc quand même se rendre à leurs installations afin de constater les dégâts et se préparer à lancer une récolte prioritaire des arbres affectés. «Le bois affecté par le feu peut être récolté. Le coeur est toujours sain pour la plupart. C’est important d’aller le récolter rapidement par contre parce qu’il y des insectes: lorsque l’insecte atteint le coeur, le bois a beaucoup moins de valeur», a expliqué la ministre Blanchette Vézina.

François Bonnardel a aussi annoncé la réouverture de la route 389 qui relie Baie-Comeau au réservoir Manicouagan et à Fermont. La voie ferrée qui relie Schefferville à Sept-Îles, elle, doit être remise en service la semaine prochaine, redonnant accès non seulement à la ville nordique, mais aussi aux communautés autochtones qui la bordent et qui se trouvaient isolées depuis sa fermeture.

Adaptation aux changements climatiques

De nouveau questionnée sur les mesures d’adaptation aux changements climatiques, la ministre Blanchette Vézina a affirmé qu’avec la SOPFEU «on est en élaboration et bien avancés dans une stratégie d’adaptation aux changements climatiques».

Elle a fait valoir que certaines communautés sur la Côte-Nord ont déjà amorcé des travaux de protection, notamment avec l’aménagement de barrières coupe-feu, des bandes autour des communautés où la végétation est retirée pour créer une zone tampon.

«La stratégie d’adaptation aux changements climatiques pour nos forêts était en cours d’élaboration. On va certainement l’ajuster avec ce qu’on est en train de vivre en ce moment», a-t-elle reconnu.