L’Ontario compte supprimer tous les obstacles au commerce interprovincial
TORONTO — Le premier ministre de l’Ontario, Doug Ford, a exhorté tous ses collègues premiers ministres à se joindre à sa province et à d’autres pour prendre des mesures visant à éliminer les obstacles à la libre circulation des biens et des travailleurs au Canada, présentant cette approche comme un moyen de soutenir l’économie contre les effets des droits de douane américains.
Le gouvernement Ford a déposé mercredi un projet de loi visant à assouplir le commerce interprovincial et a signé des protocoles d’entente avec les premiers ministres de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick, convenant qu’un bien, un service ou un travailleur enregistré reconnu dans une province est acceptable dans l’autre.
«Aucune province ne peut à elle seule éliminer ces barrières commerciales, a déclaré le premier ministre ontarien. Nous avons plutôt besoin que les 13 provinces et territoires travaillent ensemble, avec le gouvernement fédéral, pour bâtir un Canada plus fort et plus uni (…) Ces accords constituent un modèle et un défi pour les autres provinces et territoires de se joindre à nous. C’est une victoire pour chaque propriétaire d’entreprise, chaque travailleur et chaque communauté freinée par la bureaucratie et les doublons.»
Le premier ministre de la Nouvelle-Écosse, Tim Houston, dont le gouvernement a déjà adopté une loi sur le commerce interprovincial, a déclaré que les 13 provinces et territoires évolueront probablement à des rythmes différents et auront des objectifs différents, mais il est convaincu que tous les Canadiens reconnaissent la nécessité du changement.
«Je pense que chacun réfléchit à la solution la plus adaptée à ses besoins et à la rapidité avec laquelle il peut agir, a-t-il dit. Je pense que nous cherchons à mobiliser les premiers acteurs, la coalition des volontaires, afin de créer un élan.»
Le projet de loi de l’Ontario ferait de la province le premier gouvernement au Canada à supprimer sans condition toutes les exceptions actuelles au libre-échange interprovincial, ont déclaré des représentants provinciaux. Parmi les exemples, on compte l’obligation pour les fournisseurs de services immobiliers de l’Ontario d’avoir une présence locale, la limitation des permis de guide de piégeage et de chasse ou encore l’obligation d’utiliser des raisins cultivés localement pour la production de vin.
La loi vise à ce que les biens, les services et les travailleurs des provinces et territoires ayant conclu un accord de réciprocité soient automatiquement reconnus en Ontario.
Par exemple, des représentants indiquent qu’actuellement, certains camions doivent s’arrêter aux frontières provinciales pour changer la signalisation. L’harmonisation de ces exigences permettrait donc à ces entreprises d’économiser du temps et de l’argent.
Concernant l’alcool, sujet de discorde depuis fort longtemps dans les négociations commerciales interprovinciales, le projet de loi instaurerait un modèle de vente interprovinciale directe aux consommateurs, permettant aux résidants de l’Ontario d’acheter directement auprès des producteurs des autres provinces, et aux producteurs ontariens de vendre directement aux consommateurs ailleurs au Canada.
Transformer une menace en opportunité
La première ministre du Nouveau-Brunswick, Susan Holt, a déclaré qu’il s’agissait d’une excellente occasion.
«Nous pouvons nous réjouir au Canada et nous encourager mutuellement avec des produits fabriqués au Canada, peut-être plutôt qu’aux États-Unis, a-t-elle dit. Nous sommes ravis d’aller de l’avant et de saisir cette occasion, cette menace pour notre pays mise en place par le président des États-Unis. La réponse est que le Canada devient plus fort, collabore plus étroitement et fait davantage d’affaires avec ses propres producteurs.»
Les barrières commerciales au Canada coûtent jusqu’à 200 milliards $ par année à l’économie, a déclaré M. Ford.
«Avec le président (Donald) Trump qui cible directement l’économie canadienne, on ne peut plus continuer comme avant, a insisté le premier ministre ontarien. Ces derniers mois ont clairement démontré que, en tant que premiers ministres, nous devons travailler ensemble pour bâtir une économie canadienne plus unie, plus compétitive et plus autonome, créatrice d’emplois et de prospérité ici, au pays.»
De plus, le projet de loi vise à éliminer les obstacles qui empêchent les personnes occupant certains emplois de travailler dans différentes provinces. Le gouvernement envisage également des mesures supplémentaires et spécifiques pour faciliter la tâche des professionnels de la santé en Ontario, ont indiqué des représentants.
Cela comprend des consultations sur la possibilité pour les médecins et les infirmières autorisés aux États-Unis de travailler de plein droit dans la province et la reconnaissance automatique des titres de compétences des médecins et des infirmières des autres provinces et territoires.
La Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI) s’est jointe au mouvement lancé par l’Ontario. Dans un communiqué publié dans la journée, la FCEI demande aux provinces d’accélérer la réduction des barrières interprovinciales et d’adopter la reconnaissance mutuelle.
«En période de crise comme celle que nous traversons actuellement avec les États-Unis, il faut être ouvert aux changements d’approche. Nos provinces voisines sont très actives. Le Québec ne doit pas rester dans les estrades à regarder les autres agir», a écrit François Vincent. Le vice-président pour le Québec à la FCEI appelle François Legault à déposer dans l’année un projet similaire à celui de l’Ontario.
La Fédération estime que de faire tomber les barrières du commerce interprovincial entre le Québec et l’Ontario bénéficierait à 215 000 petites et moyennes entreprises.