Une décuverte permet de mieux prévoir le risque de récidive du cancer du rein

MONTRÉAL — Des mutations génétiques présentes dans les tumeurs des patients atteints de cancers du rein permettraient de prédire leur niveau de risque de rechute, révèle une nouvelle étude publiée cette semaine dans le journal de l’Association américaine pour la recherche sur le cancer.

Un consortium international dirigé par une équipe de l’Université McGill, en collaboration avec l’Université de Leeds au Royaume-Uni, aurait réussi une importante percée dans la recherche sur le traitement du cancer du rein. Pour la première fois, des chercheurs sont parvenus à identifier les mutations génétiques associées à un plus grand risque de récidive de la maladie.

Le consortium impliquant 44 chercheurs de 23 institutions au Canada et en Europe a mené ses travaux sur une période de dix ans. Plus de 900 échantillons de tumeurs cancéreuses prélevées sur des reins de patients ont été analysés. On a isolé 12 gènes pour y observer la présence de mutations, puis les patients ont été divisés en groupes selon le nombre de mutations présentes.

«Tout le travail de séquençage génomique ainsi que de l’interprétation des données a été effectué à McGill», a précisé le Dr Yasser Riazalhosseini qui dirige l’unité de génomique de l’Institut de médecine génomique Victor Phillip Dahdaleh affilié à l’université montréalaise.

Comme l’explique le Dr Riazalhosseini, la procédure habituelle pour traiter un patient atteint d’une tumeur cancéreuse au rein consiste à la retirer par intervention chirurgicale si la maladie ne s’est pas répandue ailleurs dans l’organisme.

Or, «entre 30 % et 40 % de ces patients sont éventuellement victimes de récidives de la maladie dans les cinq années suivantes», ajoute-t-il. Les tumeurs peuvent apparaître à nouveau dans les reins ou ailleurs dans le corps et s’avérer fatales.

«Jusqu’ici nous n’avions pas vraiment de bons marqueurs biomédicaux pour évaluer le risque de récidive. On se fie à des évaluations cliniques et à une observation de la tumeur, mais ce n’est pas tellement utile», reconnaît le chercheur qui espère aider ses collègues cliniciens.

Les chercheurs ont pu constater que le risque de récidive de cancer augmentait significativement en fonction du nombre de mutations génétiques détectées dans l’ADN de la tumeur. En résumé, 90,8 % des patients dont la tumeur ne contenait qu’une mutation du gène von Hippel-Lindau (VHL) étaient considérés comme étant guéris après cinq ans de rémission.

Toutefois, dès que l’on repère d’autres mutations génétiques, les risques de rechute augmentent. Ainsi le taux de rémission complète après cinq ans baisse à 80,1 % avec une mutation supplémentaire, à 68,2 % avec deux mutations supplémentaires, puis à 50,7 % avec trois mutations supplémentaires ou plus.

Traitements personnalisés

Fort de ces résultats probants, les chercheurs espèrent pouvoir aider les oncologues dans l’élaboration des plans de traitement de leurs patients. En ayant la possibilité de faire analyser la tumeur de leur patient, les médecins pourront mieux évaluer le risque de récidive du cancer et ainsi établir une stratégie plus agressive ou plus douce à la suite de l’intervention chirurgicale pour retirer la tumeur.

«En s’appuyant sur nos critères de risque, les médecins pourront mieux cibler les patients qui doivent être suivis de près avec un traitement adjuvant pour prévenir une récidive», soutient le Dr Riazalhosseini.

De l’autre côté, les patients pour qui le risque de rechute est très faible pourraient éviter d’avoir à suivre ces traitements, dont les effets secondaires peuvent grandement affecter leur qualité de vie.

Ce type d’analyse séquentielle des tumeurs est déjà utilisé pour d’autres types de cancer comme ceux du poumon ou de la prostate par exemple. Selon le Dr Riazalhosseini, il pourrait s’écouler encore quelques années avant que la pratique devienne courante dans le cas du cancer du rein.

Les auteurs de l’étude rappellent que, chaque année, plus de 400 000 personnes dans le monde, dont 8100 Canadiens, reçoivent un diagnostic de cancer du rein. Il s’agit tout de même d’un type de cancer peu commun alors qu’il ne représente que 3,2 % des cas de cancer au pays, selon Statistique Canada. La prévalence de la maladie est plus élevée chez les hommes que chez les femmes.

Cette relative rareté explique en partie le retard dans la recherche par rapport à d’autres types de cancers.

«Les tumeurs dans le cancer du rein sont très différentes d’un patient à l’autre, alors il fallait pouvoir compter sur un large échantillon de patients pour trouver des éléments communs», observe le chercheur de l’Université McGill.

Ces travaux échelonnés sur dix ans ont ainsi permis aux scientifiques de miser sur le plus vaste échantillon de l’histoire de la recherche sur le cancer du rein.

Le contenu en santé de La Presse Canadienne obtient du financement grâce à un partenariat avec l’Association médicale canadienne. La Presse Canadienne est l’unique responsable des choix éditoriaux.