Aide financière refusée pour l’éradication du myriophylle à épi au lac du Huit
La Municipalité d’Adstock et l’Association de protection de l’eau du lac du Huit (APEL-du-Huit) s’expliquent mal la décision de la Fondation de la faune du Québec (FFQ) qui a décidé de ne pas financer un projet dans lequel il était question de limiter l’apparition et la propagation de toutes espèces exotiques envahissantes.
Rappelons qu’en 2018, le myriophylle à épi a été détecté dans le lac du Huit. Parfois appelée plante zombie, celle-ci provient d’Asie, a été transportée par les bateaux et a commencé à se propager dans les cours d’eau et les lacs du Québec. Elle est maintenant présente dans plus d’une centaine de plans d’eau sur le territoire de la province.
Il y a quelques semaines, des plongeurs spécialisés ont arraché manuellement la plante et ses racines dans le lac du Huit, mais le travail devra se poursuivre chaque année jusqu’en 2021. D’ailleurs, une partie plus dense de cette plante envahissante est toujours présente au milieu du lac. L’APEL-du-Huit a alors décidé d’interdire la navigation dans cette zone. La circulation nautique, surtout motorisée, provoquerait le broyage de ces plantes nuisibles et augmenterait sa prolifération. Une trentaine de bouées entourent présentement ce périmètre où il est indiqué «zone interdite».
Le coût des travaux et des mesures mis en place s’élève à plus de 60 000 $. L’association est mise à contribution, ainsi que les riverains. De plus, la Municipalité a priorisé ce projet dans son fonds des projets environnementaux et la MRC des Appalaches a accordé une aide financière de 3000 $ via le fonds des cours d’eau.
Le refus met en péril les lacs de la région
Dans une lettre adressée à la FFQ, la Municipalité et l’APEL-du-Huit ont vivement dénoncé leur désaccord. Selon la fondation, l’objectif de limiter l’introduction et la propagation des espèces exotiques envahissantes n’était pas une raison suffisante pour obtenir une aide financière.
«Le principe de précaution doit être pris plus au sérieux. Ce refus met en péril la seule frayère à dorés connus de deux de nos lacs, soit les lacs du Huit et à la Truite. Nous demandons que la fondation revoie rapidement sa position et comprenne l’urgence d’agir», a soutenu Guy Châteauneuf, président de l’APEL-du-Huit.
Puisque le myriophylle à épi se propage par bouture et qu’il se dépose aux endroits où il y a peu de courant, son site d’implantation attaquera donc la survie des espèces aquatiques et les végétaux qui font partie des lacs de la région étant donné que le lac du Huit est à la tête d’autres étendues d’eau.
«La situation est très préoccupante et la fondation refuse d’aider les communautés riveraines prises avec ce fléau grandissant. Nous ne pouvons pas rester les bras croisés et rien faire. Nous demandons que la FFQ étudie à nouveau notre dossier et en arrive à une conclusion différente», a mentionné le maire d’Adstock, Pascal Binet.
Manque de fonds
Annie Lebel, coordonnatrice de projets à la FFQ, a indiqué au Courrier Frontenac que la principale raison de ce refus est le manque de fonds. «Nous nous sommes vus confié une enveloppe de 6,25 millions $ sur cinq ans pour un programme visant à limiter l’introduction et la propagation de plantes envahissantes dans des sites ou des secteurs d’intérêt écologique. Il faut comprendre que ce n’est pas un programme spécifique au myriophylle à épi. Il vise l’ensemble des plantes exotiques envahissantes, que ce soit la renouée du Japon, le roseau commun, le nerprun, la châtaigne d’eau et plusieurs autres. La problématique est très vaste et touche plusieurs domaines», a-t-elle expliqué.
L’enveloppe assez restreinte, a-t-elle dit, ne leur permet donc que de prioriser des habitats fauniques ou floristiques d’intérêt ou vraiment particuliers. «C’est certain qu’avec 1,25 million $ par année, nous ne pouvons pas faire beaucoup de choses étant donné les coûts importants pour l’éradication. Dans le cas du myriophylle à épi, il y a des enjeux sur la biodiversité de façon générale, mais nous pourrions être présents dans un cas particulier où il y aurait une espèce ou un habitat vraiment important à préserver et la possibilité d’éradiquer l’espèce. Nous n’avons pas la disponibilité financière pour des projets de contrôle à perpétuité ou sur plusieurs années», a ajouté Mme Lebel.
Est-ce que la Municipalité d’Adstock et l’APPEL-du-huit pourraient refaire une demande dans les prochaines années? «C’est du cas par cas et nous basons la décision en fonction des éléments présentés. S’il a du nouveau qui pourrait faire changer notre décision, nous sommes ouverts au dialogue. Pour l’instant, je ne peux pas dire si ce serait possible qu’elle change», a affirmé la coordonnatrice de projets.
Mentionnons que dans la première année de l’enveloppe, la FFQ a financé 53 projets pour un montant total de 1,2 million $. D’ailleurs, 16 d’entre eux concernaient le myriophylle à épi, ce qui a représenté des coûts de 300 000 $.
Mesures au lac du Huit
– Arrachage de la plante : En juin/juillet, une équipe de plongeurs spécialisés a sillonné le lac afin d’arracher la plante et ses racines afin de s’en départir convenablement. Le tout devra être répété chaque été pendant trois ans (2019-2020-2021).
– Contrôle du débarcadère : Pour éviter que la plante ne soit réintroduite par un bateau contaminé, les plaisanciers devront obligatoirement nettoyer à haute température toute embarcation (coque, pied du moteur, turbine, etc.) qui aura visité un autre plan d’eau. Une nouvelle politique a d’ailleurs été adoptée en ce sens. Les citoyens peuvent la consulter sur le site Internet, soit au www.lacduhuit.com.
– Sensibilisation : Les riverains doivent pouvoir reconnaître le myriophylle à épi et ses conséquences, mais savoir aussi ce qu’ils peuvent faire pour aider à la bonne santé du lac. À cet effet, le simple fait de s’éloigner des rives à basse vitesse et de naviguer dans les parties centrales du lac fait une différence.