Deux adolescents de la région privés de leur sport favori

Depuis presque deux ans, Véronique Mc Intyre multiplie les démarches pour que ses fils Éloi et Maïk puissent jouer à leur sport favori, le football, dans la ville de Thetford Mines où la famille s’est établie en 2020. Toutefois, le seul programme pouvant accueillir les deux adolescents, celui des Montagnards de la Polyvalente de Thetford Mines, ne leur est pas accessible en raison des règles du Réseau du sport étudiant du Québec (RSEQ).

Éloi et Maïk ne sont pas inscrits à la polyvalente, ils fréquentent plutôt la seule école secondaire anglophone de Thetford, soit le A.S. Johnson Memorial High School. Les deux jeunes ont toujours fréquenté une école en anglais et lorsque la famille a déménagé dans la région, il était naturel pour eux de poursuivre de cette façon. Cependant, leur école ne peut pas offrir le football puisqu’elle accueille trop peu d’élèves. Il est donc impossible de former une équipe. 

« Mon conjoint et moi faisions partie de l’association où nos fils jouaient avant, celle des Barons à Saint-Bruno-de-Montarville qui évoluent dans une ligue civile. J’ai donc commencé en 2021 à faire des démarches auprès de la Ville de Thetford Mines pour voir la possibilité de créer une équipe au niveau civil. Nous avons eu une belle ouverture, mais nous avons réalisé que le bassin de joueurs était trop petit et qu’il y avait des restrictions pour le nombre de terrains disponibles », raconte Véronique Mc Intyre.

La formation civile la plus près de Thetford Mines est celle des Vicas de Victoriaville. Éloi et Maïk ont d’ailleurs participé à quelques pratiques, mais à trois entraînements et une partie par semaine, les allers-retours de près de deux heures devenaient compliqués, surtout les soirs de semaine. 

Une dérogation a donc été demandée au RSEQ pour que les deux garçons puissent s’aligner avec les Montagnards. La famille a obtenu la collaboration de leur école et de la Polyvalente de Thetford Mines dans ce dossier. Il y a quelques semaines, tout juste au début de l’année scolaire, le RSEQ leur signale avoir besoin d’une seule lettre signée par les deux directions scolaires. Celle-ci a donc été envoyée le lundi 11 septembre. Le vendredi suivant, la Polyvalente de Thetford Mines reçoit la réponse que la demande est refusée.

« Suite à votre demande de dérogation afin que deux étudiants-athlètes de A.S. Johnson Memorial puissent compétitionner dans votre équipe de football, la Commission sectorielle secondaire s’est réunie, exceptionnellement, afin de prendre une décision sur votre demande. Considérant que votre établissement ne répond pas aux critères de statut précaire en football et que vos établissements n’ont pas le même conseil d’établissement, la demande de dérogation a été refusée », peut-on lire dans la missive.

Pour Véronique Mc Intyre et son conjoint Ghislain Giguère, cette décision va à l’encontre de la mission du RSEQ qui est de contribuer « à la persévérance et à la réussite éducative ainsi qu’au développement de la personne par la promotion de la santé, la pratique du sport et de l’activité physique en milieu étudiant ».

« Ce qu’ils ont répondu, c’est le contraire de ce qu’ils prônent, juge M. Giguère. Si leur objectif est d’encourager le sport, ce n’est pas ça qu’ils font. »

« Ils ont décidé d’y aller selon les règles sur papier et de ne pas tenir compte de deux jeunes qui veulent seulement pratiquer leur sport favori. Ils n’ont pas pris en considération qu’il n’y a tout simplement pas d’autre option pour eux dans la région », renchérit Mme Mc Intyre. 

Éloi et Maïk préfèrent également continuer leur scolarité à l’école anglophone puisque c’est ce qu’ils ont toujours connu. Ils sont donc devant un dilemme : l’école ou le sport? Pour leur famille, cette question ne devrait tout simplement pas exister.

« Ils ont toujours un ballon de football près d’eux, ils regardent les matchs à la télévision, ils suivent les statistiques et ils en parlent constamment. Ils mangent du football. C’est vraiment dommage que ce soit des règles comme celles-ci qui les empêchent de jouer », soutient Véronique Mc Intyre.

UN CHOIX

En entretien avec le Courrier Frontenac, le directeur général du RSEQ de Québec-Chaudière-Appalaches, Mathieu Rousseau, a expliqué que le statut précaire a été établi pour que deux petites écoles puissent se regrouper afin de former une équipe de football. La Polyvalente de Thetford Mines et le A.S. Johnson Memorial ne répondent toutefois pas aux critères puisque la première est trop grande et que les deux établissements ne font pas partie du même centre de services.

« Nous faisons du sport scolaire et les membres chez nous ce sont les écoles. Elles décident d’offrir certaines activités ou non. Nous ne sommes pas du sport civil dans lequel les jeunes peuvent jouer peu importe l’établissement où ils vont. Pour nous, c’est un moyen d’éducation et le principe de base c’est que le jeune représente son école afin de favoriser un sentiment d’appartenance et la réussite. C’est le fondement même du sport scolaire », affirme M. Rousseau.

Selon lui, ce type de demande de dérogation n’arrive pratiquement jamais puisqu’avant de faire le choix d’une institution, les jeunes et leur famille vont la sélectionner en fonction de ce qu’ils veulent comme service. « Ils ont décidé d’aller à un endroit qui n’offrait pas le football et de poursuivre en anglais, cela fait partie du choix. »

Un processus d’appel est possible pour ce type de cas, mais cela entraîne des frais pour l’école membre du RSEQ qui en fait la demande et la Polyvalente de Thetford Mines n’a pas manifesté d’intérêt en ce sens, indique M. Rousseau.